Pierre Desmarez et Pierre Tripier, Chapitre 6 "Les études empiriques de Max Weber sur le travail agricole et industriel" in Les enquêtes ouvrières dans l’Europe contemporaine, sous la direction de Éric GEERKENS, Nicolas HATZFELD, Isabelle LESPINET-MORET, Xavier VIGNA, Editions La Découverte, collection Recherches, décembre 2019, 448 pages; pp.114-124.
S’il est un spectre qui hante l’Europe des XIXe et XXe siècles, c’est bien celui de la classe ouvrière. En témoignent les innombrables enquêtes qui lui sont consacrées : elles disent combien la « question sociale », telle qu’elle s’invente avec l’industrialisation, est d’abord une inquiétude sur la condition ouvrière et son évolution. Ces mondes ouvriers, si prompts aux soulèvements, constituent une énigme que de multiples enquêtes visent à résoudre, le plus souvent pour conjurer une menace.
Ce livre propose un voyage étonnant à ses lecteurs en les conduisant, par les yeux des enquêteurs, dans les taudis de Manchester, les cités minières du Borinage ou les usines Mirafiori de Turin. Il éclaire d’un jour nouveau des figures illustres des sciences sociales : Frédéric Le Play, Max Weber ou Maurice Halbwachs ; mais il les fait aussi voisiner avec des artistes (Zola et les écrivains naturalistes, les cinéastes autour de Chris Marker) et avec des collectifs soudés par un engagement – féministes, jocistes ou révolutionnaires.
En explorant ce qui mêla indissociablement pratiques scientifiques et passions politiques, l’ouvrage offre une contribution originale à une histoire transnationale de l’Europe contemporaine.
Cairn.Info :
"L’organisation sociale de la production et l’évolution du fonctionnement de l’économie sont parmi les principaux fils conducteurs de l’œuvre de Max Weber (1864-1920). Si l’essentiel de cette dernière repose sur une maîtrise impressionnante de sources documentaires secondaires et de la production scientifique de ses prédécesseurs, Weber a néanmoins, à deux périodes de sa carrière, consacré une énergie considérable à la conception et à l’analyse d’enquêtes originales, basées sur des questionnaires, des archives et de l’observation directe. Dans un premier temps, il s’intéresse au travail agricole et, quinze ans plus tard, il aborde empiriquement l’organisation du travail dans l’industrie. Ces recherches, qui ne l’empêchent pas de publier en parallèle des textes plus abstraits, à la fois se nourrissent et alimentent ses réflexions théoriques et méthodologiques, tout comme ses relations à la politique de son temps.
Aussitôt son habilitation obtenue, Weber s’implique dans l’analyse des résultats d’une vaste enquête réalisée à l’initiative du Verein für Sozialpolitik portant sur l’organisation de l’agriculture en Allemagne. En décembre 1891, 3 180 longs questionnaires sont envoyés à des propriétaires terriens, dont 2 277 reviennent complétés. Un deuxième questionnaire, portant plus spécifiquement sur les relations professionnelles est envoyé à 562 employeurs sélectionnés, en février 1892 ; 291 reviennent complétés. Les ouvriers ne sont pas directement interrogés.
Les résultats de cette enquête sont publiés en trois volumes, chacun d’eux portant sur une région d’Allemagne …"
Decitre.fr :
"La question sociale, telle qu'elle s'invente avec l'industrialisation, s'avère au premier chef une inquiétude sur la condition ouvrière et son évolution. En revisitant ce qui fut indissociablement une pratique scientifique et une passion politique, cet ouvrage offre une contribution originale à une histoire transnationale de l'Europe contemporaine. S'il est un spectre qui hante l'Europe des XIXe et XXe siècles, c'est bien celui de la classe ouvrière.
Ces mondes ouvriers, si prompts aux soulèvements, constituent d'abord une énigme que de multiples enquêtes visent à résoudre et une menace qu'il s'agit d'évaluer et de résorber. Ce livre propose le premier inventaire raisonné de ces enquêtes à l'échelle européenne et montre combien ces pratiques structurent le champ politique et les sciences sociales. Partant de trois moments où l'enquête ouvrière s'impose dans le débat public européen, l'ouvrage envisage ensuite des configurations d'enquêtes, saisies au prisme des professions qui les mènent, des organisations qui les suscitent, des thèmes qui les structurent ou des controverses qu'elles nourrissent.
Au coeur de ces enquêtes, les ouvriers en sont régulièrement aussi les acteurs, y trouvant parfois un terrain de formation. L'ouvrage propose ainsi un étonnant voyage à ses lecteurs : s'il leur fait parcourir l'Europe en tous sens, il les dépayse en les conduisant de la Vienne impériale aux taudis de Manchester et des cités minières du Borinage jusqu'aux usines Mirafiori de Turin. Il revisite aussi des figures illustres des sciences sociales : Engels, Le Play, Weber ou Halbwachs.
; Les faisant voisiner avec des artistes, Zola et les écrivains naturalistes ou les cinéastes autour de Chris Marker autant qu'avec des collectifs soudés par un engagement : des jocistes de Belgique et de France aux militants révolutionnaires français et italiens des années 68."